1. Origines et objectifs de MPLS
Nous avons vu qu’il existait plusieurs façons d’implémenter de la QoS IP sur les réseaux ATM, supports de la qualité de service (QoS) par excellence :
· Integrated Services (IntServ) ;
· Differencied Services (DiffServ) ;
· MPLS (Multi Protocol Label Switching).
Avec IntServ, les routeurs IP, étendus à l’intégration de services, doivent connaître et maintenir l’état du trafic qu’ils véhiculent. De plus, ils doivent être capables de réserver la ressource et le mécanisme de contrôle des ressources doit être explicite. Pour cela, le protocole RSVP (Resource ReSerVation Protocol) de l’IETF (International Engineering Task Force) est utilisé. Avec DiffServ, le jeu de comportements par sauts PHB (Per Hop Behaviors) explique comment l’acheminement (forwarding) est réalisé. Un contrat de trafic SLA (Service Level Agreement) doit être négocié par l’utilisateur. Par contre, contrairement à IntServ, DiffServ n’utilise pas le protocole RSVP et la classification des paquets IP se fait au niveau des noeuds d’extrémité du réseau et non pas au coeur du réseau. De plus, les flots sont agrégés et acheminés au coeur du réseau.
Pour aborder MPLS, plaçons-nous dans le contexte IP sur ATM. Un routeur IP possède deux fonctions essentielles :
· Le routage ;
· L’acheminement.
Avec l’IP classique, la fonction de routage offre au routeur une vision de la topologie du réseau en exécutant un algorithme (Link State Routing) et construit les tables de routage et d’acheminement. La fonction d’acheminement analyse l’en-tête du paquet IP et détermine le prochain routeur vers lequel sera transmis le paquet. Il existe deux types de routage :
· « Saut-par-saut » (hop-by-hop routing) ;
· « A la source » (source routing).
Dans le routage « saut-par-saut », chaque routeur choisit le prochain routeur (ou saut) en se basant sur sa propre table de routage. Une décision de routage est effectuée à chaque noeud du réseau qui n’a pas besoin de connaître l’intégralité de la topologie du réseau. Dans le routage « à la source », le 1er routeur rencontré par le paquet (ingress router) calcule un chemin et spécifie l’ensemble des routes à suivre. Un algorithme de routage de type « état des liens » (Link State Routing) est alors nécessaire.
Avec MPLS, les équipements déjà en place sont conservés (routeurs IP et ATM) mais la fonction « Short Cut » de ATM (Asynchronous Transfer Mode) est ajoutée aux fonctions de l’IP classique. La fonction « Short Cut » utilise le protocole NHRP (Next Hop Resolution Protocol) proposé par l’IETF dans le RFC 2332 (Request For Comment) et permet d’ouvrir des raccourcis directs entre 2 stations n’appartenant pas aux mêmes sous-réseaux logiques IP (LIS, pour Logical IP Subnet).
Les paquets IP sont découpés en cellules transmises sur la connexion de voie virtuelle VCC par défaut (Virtual Channel Connection). Si un routeur reçoit une rafale de paquets IP qui le congestionne, il transmet au routeur précédent une requête de re-direction des cellules ATM vers un autre VCC ainsi qu’au routeur suivant qui agit de même. Le routeur intermédiaire, congestionné, maintient alors un contexte entre les deux nouveaux VCC et les cellules qui y transitent n’ont plus besoin d’être analysées (adresse source et destinataire) : c’est l’IP switching proposé par Ipsilon. Plutôt que de commuter des adresses IP, chaque adresse peut être codée par un tag plus court : c’est le tag switching.
Ces 2 techniques de commutation sont à la base du MPLS, le concept de tag étant généralisé à la notion d’étiquette (label) : c’est la commutation d’étiquettes ou label swapping. Ainsi, MPLS ajoute à la couche IP classique une couche orientée connexion.
Les objectifs de MPLS sont d’offrir de la QoS , c’est-à-dire d’autoriser de nouvelles routes à certains paquets IP par rapport à la route par défaut. Avec l’IP classique, le calcul d’une route optimale est assuré par l’algorithme de l’arbre de plus court chemin SPT (Shortest Path Tree), si bien que certains chemins entre routeurs IP ne sont jamais empruntés. Ce sont ces chemins que MPLS utilisera pour offrir de la QoS. Dans l’architecture en couches IP sur ATM, la couche ATM assure l’acheminement des cellules et la couche IP, dopée de nouvelles fonctionnalités, offre des services intelligents.
Nous verrons dans les paragraphes suivants comment MPLS offre des services différenciés lorsque les routeurs d’extrémité utilisent le mécanisme de commutation d’étiquettes pour acheminer les paquets. Nous étudierons également les classes de services CoS (Class of Service) et comment chacun des routeurs classe les paquets IP par type d’acheminement dans des FEC (Forwarding Equivalent Class), la QoS offerte étant corrélée au chemin suivi. Enfin, nous verrons comment les liens sont réservés par le Traffic Engineering avec les protocoles RSVP et CR-LDP (Constrained Routing - Label Distribution Protocol).
Notons que les objectifs de MPLS peuvent se résumer à :
· Augmenter les performances et la « scalability » (économie d’échelle) du réseau ATM.
· Simplifier l’implémentation d’un acheminement des paquets IP basé sur la QoS.
· Augmenter la flexibilité au niveau du routage.
· Diminuer la taille des tables de routage.
· Simplifier le management.
· Etre indépendant des couches 2 et 3 (aspect multi-protocolaire).
· Supporter le multicast et la QoS.